Niché au cœur du Pays-d’Enhaut vaudois, Ormont-Dessous est l’un de ces villages alpins où les siècles défilent sans effacer l’empreinte du passé, ni altérer la qualité de vie. Traversé par la Grande Eau et encadré par les sommets du massif des Diablerets, ce village mêle traditions rurales, environnement préservé et accueil bienveillant. Que l’on soit randonneur, gastronome, ou simplement curieux de découvrir un coin authentique du canton de Vaud, Ormont-Dessous mérite une halte attentive.
Une géographie à échelle humaine
Ormont-Dessous s’étend sur plusieurs hameaux, dont les plus connus sont Le Sépey, Les Mosses et La Comballaz. Cette dispersion géographique ne dilue pas le tissu social ; au contraire, elle reflète une manière de vivre en lien direct avec la montagne. La population, quoique modeste (environ 1’200 habitants), reste active et investie, entre artisanat local, agriculture de montagne et activités touristiques calibrées sur la nature.
Au centre du village du Sépey, chef-lieu de la commune, on trouve les services essentiels : poste, école, commerces et un petit marché hebdomadaire. Le train Aigle – Sépey – Diablerets (ASD), incontournable pour quiconque veut explorer la région sans voiture, relie efficacement la vallée au monde alpin dès les beaux jours.
L’empreinte d’un passé vivant
À Ormont-Dessous, le bâti raconte l’histoire. Les anciens chalets à balcons fleuris côtoient les granges en madriers noirs, patinées par les hivers successifs. Un détour par l’église du Sépey, datant du XVIIIᵉ siècle, offre un témoignage architectural intéressant du protestantisme rural. Le pont couvert de la Grande Eau, avec sa structure en bois bien conservée, attire lui aussi les curieux.
Chaque été, des bénévoles redonnent vie au four à pain communal lors des « cuissons du pain » ouvertes au public. L’occasion d’échanger des recettes, des sourires, et de goûter à un pain local au goût de levain et de cuisson lente. C’est typiquement ce genre de gestes, discrets mais sincères, qui maintient une mémoire vivante au cœur du village.
Le terroir au quotidien
Ormont-Dessous n’a pas besoin de spectacles grandiloquents pour séduire. Sa gastronomie repose sur la simplicité et le bon sens. Les produits du terroir occupent le centre de l’assiette, en particulier le fromage. L’alpage du vallon de La Lécherette ou celui du col des Mosses produit un fromage à pâte dure tout sauf ordinaire, souvent utilisé dans les fondues ou râpé sur les röstis servis dans les buvettes d’altitude.
Au restaurant le Cerf, au Sépey, la patronne sert encore une croûte au fromage traditionnelle, préparée avec soin, accompagnée d’un verre de chasselas frais. Rien d’extravagant, mais un goût précis, franc, en harmonie avec le lieu.
En hiver, certains profitent des premiers frimas pour faire sécher la viande à l’air libre, selon une méthode ancestrale. Et durant l’été, les confitures maison aux myrtilles d’altitude ou aux framboises des pentes donnent un air de gourmet à chaque déjeuner de montagne.
Un village actif toute l’année
Contrairement à certains lieux de montagne qui tendent à s’endormir hors saison, Ormont-Dessous maintient une activité rythmée et diversifiée toute l’année. L’hiver, la région vit au rythme du ski, en particulier au Col des Mosses où les pistes s’adressent autant aux familles qu’aux fondeurs. Le centre nordique y propose plus de 40 km de pistes damées, appréciées pour leur tracé paisible et leur panorama.
Mais le printemps et l’automne n’ont rien à envier à l’hiver. Dès les mois d’avril-mai, les randonneurs partent à l’assaut du Pic Chaussy (2’351 m) ou du bien nommé Lac Lioson, une merveille aux eaux limpides prise entre falaises et alpages. L’automne, quant à lui, colore les forêts de chênes et de mélèzes, offrant une toile parfaite pour les photographes et amateurs de balades contemplatives.
Entre traditions et modernité
Le dynamisme d’Ormont-Dessous se voit aussi dans sa volonté de moderniser sans trahir. Le village propose par exemple un accès internet performant via la fibre dans plusieurs hameaux, un détail non négligeable pour les familles qui souhaitent s’y installer à l’année ou pour les télétravailleurs attirés par la montagne.
Mais rien de cette modernité ne se fait au détriment de l’identité. Le Carnaval du Sépey, organisé chaque début février, réunit un savoureux mélange de chars décorés, confettis, et musiques locales, transmis de génération en génération. On y croise des écoliers comme des anciens, tous soucieux de préserver une fête qui n’a rien perdu de sa convivialité.
Des habitants engagés
Ce qui frappe à Ormont-Dessous, c’est la qualité des relations humaines. Dans les hameaux, on s’appelle souvent par le prénom et les portes restent ouvertes. L’implication citoyenne se traduit par des comités bénévoles actifs dans plusieurs domaines : entretien des sentiers, animations culturelles, accompagnement des jeunes. Lors de ma dernière visite, j’ai croisé un groupe de retraités en train de refaire la signalétique d’un chemin de randonnée. Non pas parce qu’on leur avait demandé, mais parce qu’ils y tenaient.
La commune, dirigée par un exécutif pragmatique, investit régulièrement dans l’entretien du patrimoine et l’amélioration des infrastructures douces, comme la rénovation récente du chemin du bisse entre Les Voëttes et La Comballaz, désormais praticable à vélo.
Une destination discrète mais accueillante
À l’heure où le tourisme de montagne peut parfois rimer avec surfréquentation, Ormont-Dessous joue une autre carte. Ici, pas de grandes stations bétonnées ni de remontées mécaniques imposantes. On cultive l’échelle humaine, le sens de l’accueil et la mise en valeur de ce qui existe déjà. Cela attire un public soucieux de qualité plutôt que de quantité.
Les hébergements sont variés, allant du petit gîte familial au chalet d’hôtes rénové, parfois même une roulotte d’alpage pour une nuit insolite. L’Office du tourisme du Sépey informe bien, propose des cartes de randonnées, des itinéraires à vélo et des idées de visites locales, le tout avec une touche d’humilité qui devient rare ailleurs.
Informations pratiques pour une escapade réussie
Si vous envisagez une escapade à Ormont-Dessous, voici quelques conseils utiles :
- Le train ASD relie Aigle au Sépey en 30 minutes, avec une vue imprenable sur la vallée.
- La période de juin à septembre est idéale pour les randonnées. En hiver, décembre à mars garantit de bonnes conditions de ski nordique.
- Le marché hebdomadaire du Sépey se tient le samedi matin sur la place centrale.
- Le Col des Mosses est accessible en voiture toute l’année (attention toutefois aux conditions hivernales).
- Pensez à réserver votre hébergement en avance lors des périodes de congés scolaires ou lors d’événements locaux comme la Fête du Bois.
Ormont-Dessous ne se vit pas à la hâte. Pour l’apprécier, il faut prendre le temps de discuter avec un fromager, de marcher sans but précis, ou d’assister à une messe dans la petite chapelle enneigée de La Comballaz. C’est dans ces détails-là que le charme du lieu se révèle.
Dans un monde où tout s’accélère, Ormont-Dessous propose une autre cadence. Celle du bon sens. Celle des saisons. Et surtout, celle d’une vie bien ancrée dans son terroir.